Aujourd’hui, on parle souvent de rap pour qualifier un peu tout et n’importe quoi. Il suffit de quelques rimes à peu près chantées sur des basses et un rythme à la percussion (beat) pour s’improviser rappeur diplômé. Mais contrairement à ce que pense la doxa, et conformément à ce que je pense moi, le rap français est loin, très loin de se résumer à ce qui passe à la radio.
Pour vous le prouver, j’écris cet article : le rap français, au même titre que le metal (et là les metalleux vont me taper sur les doigts, mais c’est vrai) est divisé en beaucoup de subcatégories : l’ego-trip, le rap conscient, le rap hardcore etc. et chacune est particulière et convient à un type d’auditeur particulier. J’ai essayé de vous sélectionner, dans à peu près chaque catégorie où je m’y connais un peu, le son que je pense le plus représentatif. Je peux me tromper, et je compte sur vous pour me le signaler dans les commentaires :)
Pour les nouveaux lecteurs : les avis suivant sont totalement subjectifs, ils ne cherchent en aucun cas à imposer une vérité, simplement à partager un plaisir qui nous est personnel.
Catégorie rap conscient
Le rap dit “conscient” correspond à la branche engagée du rap français. Il y est très souvent question de politique, et les “cocos” qui organisent les blocus devant les lycées (vécu) en écoutent pas mal. Même si leur tracts sont beaucoup moins intéressants que les textes qu’il est possible d’écouter. Dans cette catégorie, très peu de rappeurs sont vraiment célèbres, bien qu’il y en ait de plus en plus de nos jours.
Cependant, je suis sûr que si je vous cite des noms, vous les aurez déjà entendu quelque part. Keny Arkana, Kery James, Medine, Assassin (Rockin’ Squat), La Rumeur ou encore moins connu Mysa, par exemple, sont des artistes-types du genre.
Ca a été assez difficile de choisir, et même si j’ai eu beaucoup de mal, je dirais Keny
Arkana. Démonstration :
Ego-trip
Le principe de l’ego-trip est de se vendre le plus possible. Se vendre soi, mais aussi son quartier, sa ville, ou son département. C’est moi le meilleur en somme. Mais derrière ses apparences un peu simplistes se cache réellement un style à part entière et extrêmement intéressant malgré le fait que, malheureusement très souvent, de plus en plus de rappeurs s’arrêtent à la simplicité. Cependant, il existe aussi des pratiquants de l’ego-trip aux phrases très recherchées, et font même parfois beaucoup rire mais pas de pitié.
Dans le style, je pense que vous pourrez en trouver un peu partout sur Internet. Mais le
plus dur étant de trouver des ego-trip de qualité, je vous en offre un sur un plateau
d’argent : j’ai nommé les X-Men dans One one one. Son qui date de 1998, la qualité audio va
avec.
Petit sample :
Rap poétique
Le rap poétique a la particularité de se décrire tout seul, laissant au ô combien beau et
fort rédacteur de dossier la liberté de ne pas expliquer ce qu’il est. Rap et poésie ne sont
pas antinomiques, et vous seriez surpris de voir à quel point certains rappeurs manient la
lettre au millimètre. Encore une fois l’embarras du choix, parce que côté rap poétique, la
crème de la crème est difficile à sélectionner. Entre Oxmo Puccino, Fayçal, Rocé, MC Solaar et d’autres, je ne saurais
vous dire lequel vraiment représente le plus le rap poétique.
Disons qu’ils le font
tous, et que je ne vous en sélectionnerai qu’un, après avoir demandé un avis aux connaisseurs sur Un jour un rap, à savoir Fayçal. In Articulo Mortis :
Freestyle
Le freestyle (style libre) ne constitue pas vraiment un style de rap à lui seul. Disons
que presque chaque rappeur a déjà fait du freestyle. Le freestyle consiste à écrire sans
thème, faire une démonstration de ses talents de rimeurs, et de flow (1), de telle manière à
impressionner l’auditeur.
Et ça peut voler très très haut, démonstration ci-dessous avec Hugo Boss du TSR Crew dans 2
minutes pour conclure, qui est la dernière piste de son album “Flaque de samples” que je
vous recommande vivement :
Rap féminin
Je ne pensais pas que le rap féminin constituait une catégorie à lui-seul, mais apparemment si. Le rap féminin, comme le rap poétique, se passe d’explication. Même si je ne considère pas vraiment le rap féminin comme un genre de rap français, je peux crier cette fois-ci sans hésiter, quoiqu’un peu avec Princesse Aniès (flow de dingue), Casey. Pour son sale caractère qui se ressent dans chacun de ses sons, et ses textes vraiment recherchés. Rêves illimités, de son album “Libérez la Bête”
:
Rap commercial
Loin d’être mon style de rap préféré, le rap commercial correspond aux raps construits de
telle sorte que les textes soient en quelque sorte formatés pour pouvoir passer à la radio
et être diffusés. “Plaire au plus grand nombre” en somme. Et dans cette catégorie, les noms
de rappeurs évoquent quelque chose à beaucoup plus de personnes. La Fouine, Diam’s, Sexion d’Assaut (quelques
unes) sont exactement à cette image.
Exemple simple avec “Qui t’a dit” de Sexion
d’Assaut :
Rap hardcore
Paroles crues, critiques, récits de rue. A peu de choses près, on pourrait dire que c’est
du rap conscient. Mais le voile séparant ces deux catégories est souvent très fin, et tandis
que l’un discute des idées et de l’Histoire, l’autre traite des faits.
Pour cette
catégorie, après avoir hésité avec Expression Direkt, je nomme Ideal J, l’ancien groupe de Kery James, dans Hardcore :
Les Inclassables
Dans cette catégorie, les titres qui auraient pu aller dans presque toutes les catégories au-dessus, et aussi ceux qui, au contraire, n’auraient pu aller dans aucune des catégories sus-citées. Brêves présentations.
J’appelle IAM, collectif hip-hop originaire du Sud de la France (Marseille) et ayant déjà une renommée certaine dans le milieu du rap. Akhenaton, Shurik’N, et anciennement Freeman étaient les rappeurs de ce collectif, et DJ Kheops le beatmaker (2), et parmi les morceaux qui constituent leur prestige, Demain c’est loin :
Les amateurs de rap français sauteront de joie à l’évocation de ce qui va suivre. Scred Connexion. Groupe discret (scred en verlan) originaire du 18e arrondissement de Paris, et anciennement composé du faussement célèbre Fabe. Vieux avant l’âge donc, de la Scred :
Et pour terminer, la représentation du rap moderne, du rap contemporain, du rap de 2011. Même si L'Entourage, groupe connu en partie grâce à leur passage à Rap Contenders (qui est une “émission” de clash (3) entre rappeurs), pourrait avoir sa place ici à cause de sa notoriété, je vais plutôt vous faire connaître du moins connu, mais du, à mon avis, bien au dessus. J’ai nommé le collectif Oster Lapwass originaire de Lyon, et ici Kacem Wapalek. Leur dernier projet d'album est sorti le mois dernier, "Absence de veine dans un monde sans gain".
J’termine juste avec une petite pub pour une petite page FaceBook que je tiens depuis quelques mois maintenant, si cet article vous a intéresse. Ça s’appelle Un jour un rap, et le titre représente le concept.
Voici donc les morceaux qui représentent le plus le rap français à mon sens. Il n’y a pas eu que des classiques, et bien sûr si vous avez quelque chose à redire … c’est juste en dessous que ça se passe :)
(2) Le beatmaking est l’activité qui consiste à conçevoir et réaliser les instrumentales des morceaux de rap
(3) Un clash en rap est une confrontation verbale rappée
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