[CRITIQUE] Motorway

Étrange Festival 2012 – Catégorie « Thema Motor Psycho » & « Compétition Nouveau Genre »

Motorway était l’une des plus grosses attentes de cette session de l’Etrange Festival. Produit par le grand Johnnie To, le film dont le tournage fut terminé en 2010, a ensuite été repris par Milkyway Image, sa société, afin de subvenir à l’ébauche alors insuffisante. Classé directement comme film de voitures antagoniste à tous les films bourrins de courses poursuites, le film de Soi Cheang, réalisateur dont le nom est lié aux grands du milieu, Andrew Lau (Trilogie Infernal Affairs) ou encore Ringo Lam (Full Alert), et a plusieurs réussites commerciales, se positionnait directement comme un Drive à la sauce asiatique, avec cette touche sale et violente qui lui est propre. Comment alors ne pas s’en réjouir ? Le fait est que, au-delà d’un scénario vieux comme le monde, il semblerait surtout que Soi Cheang se soit totalement perdu dans sa volonté de rendre hommage, avant de simplement se concentrer sur le fait de faire un film. Et le résultat est ce qu’il est : maigre et décevant par rapport aux attentes. Surtout lorsque l’on voit le potentiel de certaines scènes, tout du moins quand elles s’avèrent lisibles. Oscillant entre visuel mollasson et enchaînement d’événements trop attendus pour être source d’une quelconque surprise, Motorway se plante malheureusement par lui même à cause de son manque d’adresse et son aspect parfois trop confus.

© DR

Le principal problème de Motorway vient de la simplicité de son scénario, un duo, une relation père-fils symbolique, de l’élève et du maitre, qui, si elle avait été entièrement assumée, aurait pu devenir une thématique centrale et véritable fil narratif simple mais efficace du récit. Mais au lieu de cela, Soi Cheang préfère s’orienter sur autre chose, sur la simple présence comme outil du maître, joué par l’emblématique Anthony Wong. Acteur avec qui l’élève, Swan Yue, a en plus eu la chance de tourner par le passé sur la fameuse trilogie citée plus haut, ainsi que sur un autre récit mettant en oeuvre de la mécanique, Initial D. Reste que si leur efficacité, chacun de leur coté en tant que personnage n’est d’aucun intérêt majeur, porté sur une balance humour/sérieux quelconque, que le travail de chacun est beaucoup trop flou pour être réellement considéré, un ersatz de symbiose se dégage tout de même entre les deux personnages. Par ce simple concept, même simplement aperçu, pourtant pas plus original, mais faisant partie même de cet hommage, de nombreuses bonnes idées se font sentir, notamment la confusion des genres, on retrouve ce qui fait la construction de bien d’autres genres, que ce soir le polar HK des années 80 et avant, ou même de genres bien plus étrangers : le principe du duel, de la vengeance, ou encore de la tension entre deux pistoleros, l’espaces de quelques secondes, se sont de véritables intentions qui se ressentent à l’écran… Pour de nouveau laisser la tension rechuter et échapper au contrôle de Soi Cheang. Les personnages n’ont jamais finalement la présence escomptée à l’écran, il est vrai que la mécanique reste dans un sens le personnage principal de son long métrage, mais l’absence du pilote la dégage de toute âme, rendant ces voitures aussi accessoires que dans un quelconque Fast&Furious, où elle n’est finalement qu’un objet bon pour la casse.

© DR

Car c’est pourtant ainsi que Soi Cheang se positionne, en tant que véritable amoureux de ces voitures et de leurs capacités. Il tente ainsi de les montrer sous un autre jour, quitte à déstabiliser le spectateur et à lui montrer quelque chose qu’il n’attendait peut être pas. Dans les faits, c’est bien la sensation qui s’en dégage à postériori, laissant l’impression d’avoir assisté non pas à des courses poursuites bêtes et efficaces mais à de véritables combats de pugilats entre voitures, où leurs arènes se résumeraient explicitement aux ruelles de Hong Kong. Sa vision est atypique de la course de voiture normale, rien n’est violent, extravagant, tout est brutal et frontal, dans le métal, dans le choc, donnant ainsi lieu à des passages non sans intérêt et bien plus intéressants qu’une course simple.  Malheureusement c’est le cas quand le réalisateur nous permet d’y voir un peu mieux à travers de nombreux grands angles par exemple, le reste du temps, le cadrage étant soit brouillon ou alors soit trop concentré sur un autre élément présent. Le réalisateur semble oublier qu’il fait son film aussi pour nous autres spectateurs, déroulant son film et ses cascades dans son petit coin sans toujours se soucier de leur rendu à l’écran. Certains dérapages, entrechoquements de voitures sont par ce biais simplement hors cadre à différentes reprises, et bien sûr il s’autorise à quelques reprise de petits ralentis pas toujours convainquants. Alors qu’un instant plus tard, Soi Cheang est capable  de nous signer une scène dans le noir quasi total durant une petite dizaine de minutes où une véritable tension se fait alors sentir grâce à l’utilisation d’un rythme paradoxalement lent et esquissé.


Un fugitif connu pour ses qualités de pilote de voitures met au défi un flic appartenant à une unité de police secrète.


Trop concentré sur les courbes des ses voitures, et pas forcément à tort, Soi Cheang oublie malheureusement de traiter avec la même sensibilité ses personnages. On se retrouve ainsi avec un film à double teinte, dont les défauts plombent considérablement ses prouesses et idées mémorables.
Titre Français : Motorway
Titre Original : 車手
Réalisation : Soi Cheang
Acteurs Principaux : Shawn Yue, Anthony Wong Chau-Sang, Li Haitao
Durée du film : 1h30min
Scénario : Joey O’Bryan, Kam-Yuen Szeto
Musique : Alex Gopher, Xavier Jamaux
Date de Sortie Française : n/c

About Nox

Rédacteur stellaire, parle cinéma, jeux-vidéo et de bien d'autres choses inutiles. Dirige entre autres les larbins qui enrichissent ce blog fondé quelque part aux environs de l'an de grâce 2011.
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